vendredi 3 juillet 2009

Villepin et Sarkozy : le duel continue

Entre Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin, la passion poursuit son oeuvre, nonchalante mais impitoyable.

1439897322jp7716-b9f87-90194[1]

Le 1er juillet dernier paraissaient deux interviews des deux hommes dans lesquels chacun trouvait l’occasion d’affirmer sa fermeté vis-à-vis du frère ennemi. Dans le Nouvel Observateur, Nicolas Sarkozy interrogé à propos de l’affaire Clearstream rétorquait :

"C’est la justice. Deux juges dont l’indépendance d’esprit est notoire ont instruit l’affaire. Ils ont demandé l’avis du parquet sur le renvoi de Dominique de Villepin. Le parquet pouvait dire non. Il a dit oui. Les juges pouvaient dire non. Ils ont dit oui. Laissons faire la justice pour que plus jamais des officines ne puissent salir en toute impunité."

En se cachant derrière "la justice" et le choix empreint d’ "indépendance d’esprit" des juges, Nicolas Sarkozy laisse percer sans nuance véritable sa conviction profonde. Si tout ce qu’il avance ici est juridiquement irréfutable, cette attitude et la pensée qui la soutient posent d’autres questions : Nicolas Sarkozy était-il déjà à ce point sûr de son fait lorsque, comme le raconte Bruno Le Maire dans l’un des plus grands livres politiques de ces dernières années - Des Hommes d’Etat - il partageait le pain de son petit déjeuner avec Dominique de Villepin une fois par semaine ? Et si c’était le cas, la nature de leur relation, alors malgré tout privilégiée, n’avait-elle pour seul but que le contrôle et l’espionnage réciproques ? A la lecture du livre, il est permis d’en douter, sans qu’il soit pour autant possible de lever les zones d’ombre correspondantes.

Ce qui frappe à la lecture de l’interview de Dominique de Villepin publié le même jour dans le Midi Libre, c’est la proximité de sa position avec celle de Nicolas Sarkozy, les deux se rejoignant dans la position de victime salie et calomniée. Quand on l’interroge sur l’échéance du procès Clearstream, l’ancien Premier ministre répond :

"Ce n’est pas cela qui pèse sur mes choix. C’est évidemment une échéance importante que j’attends avec impatience, car j’ai hâte que la vérité soit connue. Il y a eu dans ce dossier, beaucoup d’incompréhensions et d’instrumentalisation et ce sera l’occasion d’aller au fond de cette affaire. Dans le jeu politique, il arrive que l’on prenne des coups, je le sais... Mais là, c’est autre chose. Etre accusé injustement et être instrumentalisé, ce n’est pas pareil. Je dirais même que ce n’est pas tout à fait normal..."

Quand Nicolas Sarkozy parle d’officines qui salissent en toute impunité, Dominique de Villepin répond instrumentalisation injuste et mensonge d’état, chacun prenant à la fois à témoin la justice de son pays et le bon sens citoyen. Dans ce trialogue de sourds, où les protagonistes ne se parlent plus que par presse interposée, on en viendrait presque à penser qu’autant de colère froide et constante ne saurait être le fruit que d’une admiration mutuelle profondément déçue et blessée. Espérons néanmoins aussi que, de quelque nature qu’elle soit, ce soit bien à la vérité qu’aboutisse la justice républicaine dans cette affaire.

© AGORAVOX, Le média citoyen.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire